Australie: les Aborigènes dénoncent le résultat «honteux» du référendum sur leurs droits

INTERNATIONAL

11/1/20232 min read

Des dirigeants aborigènes ont brisé le silence d’une semaine qu'ils s'étaient imposé pour condamner l'échec du référendum du 14 octobre, qui proposait de reconnaître les populations autochtones dans la Constitution australienne et de leur donner plus de droits.

La semaine dernière, 60% des Australiens ont voté « non » à la question de savoir si la Constitution de 1901 devait être modifiée pour reconnaître les premiers habitants du pays – les populations aborigènes – et leur accorder davantage de droits.

Dans une cinglante lettre ouverte adressée au gouvernement australien, les chefs aborigènes ont ainsi fustigé le point de vue « épouvantable et mesquin » de millions d'Australiens. Le document regroupe les opinions de dirigeants autochtones, de membres de leurs communautés et d'organisations qui ont soutenu le « oui » au référendum.

Selon le partisan du « oui » Sean Gordon, la lettre ouverte n'a pourtant pas été directement signée afin que puisse s'y associer tout membre des peuples autochtones du pays qui le souhaite – aborigènes et insulaires du détroit de Torres, qui représentent 984 000 personnes, soit 3,8% de la population australienne.

« L’Australie a choisi de se rendre moins libérale et moins démocratique »

« Nous n'acceptons pas un instant que ce pays ne soit pas le nôtre. Il l’a toujours été et le sera pour toujours », ont écrit les auteurs du courrier. « La vérité, c'est que la majorité des Australiens ont commis un acte honteux, sciemment ou non, et qu'il n'y a rien de positif à en retirer », ajoute la lettre. « En refusant notre droit à être entendu sur les enjeux qui nous concernent et nous touchent, l’Australie a choisi de se rendre moins libérale et moins démocratique », estiment-ils.

Le groupe a également dénoncé l’échelle de « désinformation délibérée » durant la campagne menée par le camp conservateur pour voter « non », qui a été « sans précédent ». « Cette désinformation a proliféré en toute impunité sur les réseaux sociaux, a été répétée par les médias traditionnels et a provoqué un tsunami de racisme contre notre peuple. »

Panser les plaies d’un passé colonial

Les partisans du « oui », dont le Premier ministre Anthony Albanese, considéraient le référendum comme un moyen d'unir le pays et de panser les plaies des discriminations historiques infligées aux peuples autochtones lors de la colonisation du pays. Des peuples qui ont une espérance de vie inférieure de huit ans à celle des autres Australiens, sont en moyenne plus pauvres, plus souvent incarcérés et ont un accès moindre à l'éducation.

Au lieu de cela, la campagne électorale a mis en lumière les profondes divisions qui traversent encore la société australienne plus de deux siècles après la colonisation britannique.

Cette majorité de « non » au référendum a aussi rejeté la création d'un conseil consultatif – surnommé « La Voix » – auprès du Parlement et du gouvernement, pour émettre des avis sur les lois et les politiques publiques qui affectent les populations autochtones. Dans ce contexte, les rédacteurs de la lettre ouverte ont fait part de leur intention de créer leur propre « Voix » face aux « injustices » subies par leurs peuples.